Vita & Virginia, la rencontre littéraire et amoureuse de Virginia Woolf avec l’aristocrate Vita Sackville-West donne lieu à une admirable et intelligente mise en scène de la part de Chanya Button.
De chair et d’esprit
Virginia Woolf est devenue une figure incontournable du cinéma anglais. Ses livres sont adaptés (The Hours, Mrs Dalloway, Orlando), sa vie cernée. Elle est encore plus avec ce très beau film de la jeune réalisatrice Chanya Button.
Elle relate un épisode précis et moins connu de l’existence de Virginia Woolf : la relation passionnelle qui la lia à l’écrivaine aristocrate Vita Sackville-West. Son entourage pensait qu’elle ne s’en remettrait jamais tant elle était fragile. Elle leur démontrera au contraire sa force et son intelligence en en tirant Orlando, son roman qui eut le plus de succès.
D’une passion littéraire et amoureuse
C’est l’admiration qu’y pousse Vita Sackville-West, aristocrate dévergondée et écrivaine à succès, à rencontrer Virginia Woolf . Au départ, celle-ci ne se laisse pas approcher facilement. Vita ne cède pas et utilise son charisme et son propre talent littéraire pour séduire l’auteure qu’elle vénère.
Vita mène une vie hors norme. Elle est mariée à un diplomate qui vit ses amours de son côté mais la rappelle à ses obligations de représentation. Vita s’y résout souvent mais sait prendre le large pour revenir vers Virginia au besoin. Car, Virginia est fragile. Elle vient de finir l’écriture de Mrs Dalloway qui connaît un succès timide et est déjà en proie aux démons qui auront raison d’elle.
… à l’inspiration romanesque
Quand Virginia est finalement conquise et s’ouvre à une sensualité nouvelle. Mais Vita est déjà passée à autre chose.
Alors que tout le monde s’inquiète de l’effet qu’aura désastreux ce délaissement sur Virginia, celle-ci y trouve l’inspiration d’Orlando. Le roman qui sera son premier grand succès. Dès lors, une amitié sans faille les liera jusqu’au suicide Virginia.
Vita & Virginia, soul-women
Racontée par les faits, cette histoire ne semblait pouvoir donner lieu qu’à une adaptation ou à une chronique littéraire de plus. Ce n’est pas du tout le cas ici et c’est d’ailleurs la force principale qui s’en dégage. Ce qu’a voulu capter Chanya Button, c’est l’âme de la relation entre Vita & Virginia. Et elle y parvient très bien en procédant par approche plutôt qu’en abordant le sujet frontalement. C’est Vita qui mène la danse jusqu’au moment où l’intelligence de Virginia en inverse le cours. Et cet étrange ballet se chorégraphie par touches, que scandent des échanges de lettres filmés eux en gros plan sur celle qui les écrit.
De même, les démons qui viennent perturber l’esprit de Virginia sont suggérés par des plantes qui se mettent à ramper, des décors floraux qui s’animent dans un réalisme magique qui sied à l’époque comme à l’histoire. S’y ajoutent la puissance des décors, l’extravagante élégance de Vita et l’indéniable charisme de Gemma Atterton, l’évanescence d’Elizabeth Debicki qui interprète de Virginia et le rejet salvateur de conventions sociales trop strictes. L’équilibre est parfait et contribue largement à mettre en valeur l’intelligence du propos. Une réussite !
De Chanya Button, avec Gemma Arterton, Elizabeth Debicki, Isabella Rossellini…
2018 – Angleterre – 1h50