Transit de Christian Petzold, en compétition à la Berlinale 2018 , est une déception. Le premier film tourné en France par le réalisateur allemand d’habitude passionnant s’égare complètement à Marseille.
Plus belle la vie ?
Drôle de film que ce Transit signe Christian Petzold, un des réalisateurs allemands les plus en vue du moment. A l’époque où ses films étaient peu ou mal distribués en France, Cine-Woman avait soutenu Yella puis surtout Barbara deux destins étranges de femmes fortes et troubles dans une Allemagne aux souvenirs tenaces.
Et voilà que Christian Petzold tourne ce Transit en France, à Marseille. L’histoire, adaptée du roman Transit d’Anna Seghers, met un certain temps avant de se dévoiler. Elle est pourtant simple alors que le contexte est trouble.
Traffics
Georg, présenté comme une sorte d’homme de main, doit prendre contact avec l’écrivain Weidel. L’époque est menaçante, les troupes d’occupation seront bientôt là et nombreux sont ceux qui cherchent à fuir. Georg a justement une bonne nouvelle à apporter à Weidel. Tout est arrangé, il peut fuir à Mexico. Il lui apporte même une lettre de sa femme.
Mais Weidel n’a pas attendu Georg. Il est mort. Puisque Georg est lui aussi menacé, pourquoi ne profiterait-il pas de cette opportunité? Évidemment, voler ainsi l’identité d’un mort va bouleverser la vie de Georg, surtout quand il va rencontrer la femme de l’écrivain.
Transit spatial et temporel
Ce qui est le plus déroutant – et le moins réussi- est que Christian Petzold prend le parti de tout mélanger : les époques, les transits, les populations en attente… L’action se situe ainsi à Marseille aujourd’hui, au sein d’une communauté immigrée qui parle spontanément allemand. Et parfois français mais sans accent du sud. Elle se sait menacée et attend de pouvoir fuir au Mexique (!).
Les troupes d’invasion, qui font clairement référence à l’armée allemande des années 1940, sont figurés par des policiers ou des CRS d’aujourd’hui. Ces anachronismes volontaires diminuent paradoxalement la portée politique du film. On y comprend rien ! Et surtout pas les allusions à la situation actuelle des immigrés/réfugiés/chassés…
Cherchez la femme
En revanche, une constante habite là encore le cinéma de Christian Petzold : la figure de la femme fuyante, insaisissable, puisque capable de renoncer à tout par amour, sans réelle crainte des enjeux géopolitiques qui pourtant perturbe sa vie. Une jeune actrice, Paula Beer, a remplacé Nina Hoss, l’actrice fétiche de Christian Petzold.
Mais, elle lui ressemble tellement qu’il n’y a aucun doute sur cette obsession du metteur en scène. Si la nouvelle est brune, elle est coiffée comme Barbara, ceinturée dans un trench et vêtue des mêmes robes, à la fois quotidiennes mais élégantes. Elles ont la même allure, le même regard fuyant, la même passion au bout des lèvres, et finalement, le même rôle. Troublant.
de Christian Petzold, avec Franz Rogowski, Paula Beer, Godehard Giese, Lilien Batman…
2018- France, Allemagne – 1h44
Transit de Christian Petzold est en compétition officielle à la Berlinale 2018. Sortie prévue en France le 25 avril 2018.
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