Tokyo fiancée est la troisième adaptation d’un livre de l’écrivaine belge. Amélie Nothomb est-elle soluble au cinéma? Ses livres peuvent-ils faire de bons de films?
La nostalgie heureuse
Hygiène de l’assassin de François Ruggieri en 1999, a laissé peu de souvenirs mais pas de déception. Autant Stupeur et tremblement était un livre-choc, amusant, enlevé, autant l’adaptation d’Alain Cornaud, en 2003, était caricaturale, directe. Elle ne comprenait pas l’esprit subtil qui donne leur grâce aux romans les plus réussis d’Amélie Nothomb. Et malgré Sylvie Testud dans le rôle principal.
Tokyo fiancée, troisième adaptation, s’inspire de Ni d’Eve, ni d’Adam, le pendant heureux de Stupeur et tremblement. Il aborde lui aussi le retour au Japon de la jeune fille belge. Elle y a vécu enfant et cette expérience est une partie constitutive fondamentale de son existence. Dans ce livre-ci, elle racontait son expérience professionnelle et son insertion complexe, difficile, impossible dans une grande firme japonaise.
Souvenirs heureux du Japon
Ici, et en s’inspirant toujours de cette même époque, de son retour aux sources alors qu’elle a 20 ans, elle aborde le versant heureux. Elle est toujours cette européenne tellement fascinée par un pays qu’elle décide de retourner y vivre seule, mais cette fois, elle donne des cours de français et tombe sous le charme de Rinri, son seul élève.
Les différences culturelles laissent le champs à de nombreux quiproquos parfois amusants. Mais, c’est sans compter que les livres, racontés à la première personne et dans un style simple, pour ne pas dire épuré, laissent justement un soupçon d’ironie, créent une distance que n’a jamais ce film. Ou alors par maladresse.
Tokyo fiancée : Nothomb sans l’esprit
Pauline Etienne s’y débat telle une jeune gavroche au pays des sushis, s’émerveillant ou s’agaçant des codes complexes de la société japonaise, dressant un constat hermétique d’une société aux antipodes de la la sienne. Et comme son personnage n’évolue pas ou peu, même au contact rapproché de Rinri, son attitude devient énervante, sans le recul présent dans les livres. La voix-off censée reprendre le style Nothomb devient du coup redondante.
La mise en scène en roue libre, un casting décevant, des personnages qui n’évoluent pas… font de cette Tokyo fiancée un film certes pas désagréable mais qui n’a pas la saveur qu’on est en droit d’attendre du vécu d’une personnalité aussi forte qu’Amélie Nothomb…. à moins que ce soit justement elle qui fasse écran aux adaptations de ses livres.
De Stefan Liberski, avec Pauline Etienne, Taichi Inoue, Alice de Lencquesaing…
2014 – France/Belgique/Canada – 1h40