Avec The dead don’t die, Jim Jarmusch signe une allégorie de l’Amérique actuelle qui, de charmante au début, finit en un grand n’importe quoi. Le film est en compétition officielle au Festival de Cannes 2019 dont il a fait l’ouverture.
Jarmusch plus mort que vivant
Le titre est emprunté à un morceau de musique country, qui reviendra de manière récurrente dans le film. The dead don’t die de Sturgill Simpson fixe le tempo, lancinant.
Dans une bourgade du fin fond des États-Unis où seule la mort peut arriver, un policier et son équipier sont appelés pour un vol de poulet. Un fermier raciste (suprémaciste blanc selon sa casquette) en veut à un ermite qui vit dans les bois à côté de chez lui. Bientôt ses vaches, son chien disparaissent aussi.
Un monde désaxé
Rien ne tourne plus rond à Centerville. La terre serait sortie de son axe de rotation habituelle. Du coup, il fait jour en pleine nuit, les animaux domestiques ont pris la clé des champs… et les morts se réveillent.
Le flegmatique policier Cliff et son adjoint Ronnie partent en patrouille, plus qu’ils ne mènent l’enquête. Ils découvrent qu’effectivement, les personnes décédées et enterrées sortent de leur tombe. Pourquoi? Pour réclamer ce à quoi elles s’étaient habituées vivantes : du Xanax, du Chardonnay, du café ! Et des boyaux puisqu’elles éviscèrent tous ceux qui leur tombent sous la dent.
Le retour des anciens
Seule, la nouvelle tenancière des pompes funèbres locale n’est pas affectée par la situation. As du cimeterre qu’elle manie avec dextérité, cette étrange femme aux pouvoirs magiques ne semble craindre rien, ni personne.
Que faire contre le retour de ces morts-vivants, de ses conservateurs inassouvis ? Attendre ? Lutter ? Abdiquer ? Leur nombre joue en leur faveur. Et si Jarmusch a un incontestable talent pour installer une ambiance, il a le souffle court pour finir son histoire.
Zombie kitsch
Sans se départir de sa nonchalance interprétée par l’impénétrable Bill Murray (Cliff), Jim Jarmusch confirme qu’il sait filmer l’Amérique profonde, avec un regard suffisamment décalé pour qu’on perçoive l’ironie. Les décors sont superbement kitsch – le diner notamment – les couleurs saturées et les cadres presque mélancoliques. Et qu’il a un bon carnet d’adresse puisqu’il réunit un casting d’enfer : Bill Murray, Adam Driver, Chloé Sevigny, Tilda Swinton, Tom Waits, Steve Buscemi….
Certes, mais au profit de quoi ? D’une vague critique, presque premier degré de l’Amérique de Trump, menacée par vivants et les étrangers, et à laquelle les morts seraient les seuls à croire. Et sans parler du mauvais goût de la mise en abime qui tombe complètement à plat. Tout cela manque de réflexion et d’ambition et n’avait pas grand chose à faire en ouverture du plus grand festival de cinéma du monde.
De Jim Jarmusch, avec Bill Murray, Adam Driver, Chloé Sevigny, Tilda Swinton, Tom Waits, Steve Buscemi….
2019 – Etats-Unis -1h44
The dead don’t die de Jim Jarmusch a ouvert le 72e Festival de Cannes et sortait en salle le même jour, soit le 14 mai 2019.