Mommy
Mommy de Xavier Dolan est un film bourré de talents et d’émotion. Un film qui terrasse et bouleverse jusqu’à l’os. Bravo !
Mommy de Xavier Dolan est un film bourré de talents et d’émotion. Un film qui terrasse et bouleverse jusqu’à l’os. Bravo !
On ne vit l’extraordinaire que par amour. A la fin des années 1970, Alain rencontre Jasmine, une jeune iranienne qui étudie en France. En 1978, elle se décide à rentrer à Téhéran, juste au moment où le peuple iranien se soulève contre le Shah et son régime tyrannique.
Une épisode d’espoir qu’Alain va vivre intensément. Il a rejoint Jasmine, habite au cœur de la capitale iranienne et regarde les habitants se battre pour un régime politique meilleur. Ils en appellent à Khomeiny, pensant que celui-ci les libérera du joug de la dictature. Quand Alain comprend que la libération annoncée va devenir une nouvelle aliénation, il fuit Téhéran, sans parvenir à convaincre Jasmine de le suivre. Il n’aura bientôt plus aucune nouvelle.
Ce film est étrangement construit : il progresse au gré d’images d’archives d’actualité, de la lecture des superbes lettres d’amour que Jasmine a envoyées à Alain avant qu’il ne la rejoigne à Téhéran et une fois qu’il en est revenu. Et aussi par la voix off qui incarne Alain, au gré de ses réflexions et des détails qui sont nécessaires à la compréhension de cette histoire.
Mais, leurs personnages prennent corps dans de drôles de bonhommes en pâte à modeler qui parviennent certes, à exprimer certaines émotions mais qui sont tellement schématiques, désincarnées qu’il devient difficile de s’y attacher. Bleus sont les Iraniens, beige est Alain. Ils se meuvent dans une ville complètement factice faite de polystyrène.
Le décalage constant entre les magnifiques émotions décrites dans ses lettres par Jasmine et l’aspect très conceptuel de la mise en scène de cette histoire d’amour est finalement malhabile. Peut-être que le dessin aurait été plus approprié.
Prenant place dans un contexte difficile, contrariant de la Révolution Islamiste iranienne, portée par des sentiments extrêmement forts et nobles, et par des voix très judicieusement choisies – Jean-Pierre Darroussin pour Alain, et Fanzaneh Ramzi pour Jasmine – cette histoire d’amour avait tout pour être bouleversante. Sa forme trop conceptuelle, pas assez charnelle en refroidit l’ardeur. Dommage…
2013 – France – 1h10
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©Shellac et ©Alhambra-Amélie Debacker
Anna Karenine, quintessence de l’héroïne russe, s’invite pour Noël. C’est au moins la vingtième fois que ce roman de Tolstoï est adapté au cinéma, la dernière en date étant incarnée par Sophie Marceau. Cette fois, c’est l’anglaise Keira Knightley, l’actrice fétiche et fidèle au réalisateur Joe Wright, qui endosse la robe de cette femme adultérine.
La Russie, en 1874. La belle Anna Karénine a tout ce qu’une femme de son époque peut souhaiter : un mari influent, un enfant aimant et un statut social conséquent. Au hasard d’un voyage à Moscou, elle croise le jeune comte Vronski. Le coup de foudre est aussi réciproque qu’immédiat. Elle tente pourtant d’y échapper en retournant à Saint Petersbourg mais le comte la suit. Elle entame alors une relation hors mariage qui sera la signature de sa fin, sociale, conjugale et même maternelle….
Critique sociale extrêmement piquante, le roman de Tolstoï est évidemment aussi une magnifique histoire d’amour. C’est d’ailleurs cet aspect qui inspire le plus le réalisateur : il est plus à l’aise dans la construction de l’histoire, dans la rencontre des deux amoureux et la manière dont ils s’éprennent l’un et l’autre que dans la mise en scène de la déchéance de la belle. Pourtant, il donne immédiatement le ton : la vie n’est qu’une scène de théâtre dont les tableaux se succèdent les uns aux autres et où l’essentiel est sans doute de briller pour pouvoir soutenir le regard des autres. Et cela, il le met en scène littéralement filmant Anna et ses contemporains comme s’ils étaient sur un plateau ou juste derrière, en coulisses, toujours prêts à changer de costumes ou de rôles. Cette audace formelle est aussi bluffante que lassante : sidérante quand on passe d’un gros plan sur un personnage aux champs enneigés de la Sibérie, lassante car un peu trop répétitive.
Mais, cette technique comme le casting, Keira en tête, donne une belle modernité à cette adaptation. S’il fallait comparer, disons que Joe Wright s’éloigne encore un peu plus du classicisme de ses débuts déjà fort prometteurs (Orgueil et préjugés puis Reviens moi !, toujours avec Keira Knightley) pour rejoindre l’audace formelle de Moulin Rouge ! de Baz Luhrmann, la folie en moins.
Cette Anna vaut cent fois le détour, notamment pour tous ceux qui veulent découvrir l’histoire avant de lire le roman. Un seul bémol, le charme pas tout à fait criant du fameux comte Vronski, blondinet certes séduisant interprété par Aaron Taylor-Johnson, mais qui dans notre imaginaire (plus que dans le film) ne fait pas le poids contre Jude Law (le mari un poil coincé), ici vieilli, enlaidi.
2012 – USA – 2h11