Voilà un des films en Sélection Officielle lors du Festival de Cannes 2013 que Cine-Woman attendait avec impatience. Alex van Warmerdam a une entrée fracassante dans le cinéma dans les années 1990 avec deux films très originaux « Les habitants » en 1992 et « La robe et l’effet qu’elle produit sur les femmes qui la portent et les hommes qui la regardent » en 1996. Tout un programme. C’est vrai que depuis, ses films étaient moins intéressants mais le savoir à nouveau dans le plus prestigieux des festivals semblait de bonne augure.
Mal pensant
» Borgman » commence là encore de manière radicale. Un prête et ses acolytes partent littéralement déterrer des hommes qui vivent sous terre. L’un d’eux cherche refuge dans une villa très cossue, où après un accueil percutant, il est finalement recueilli. Dire qu’il sème le désordre dans la vie très rangée et très bourgeoise de ses hôtes est un euphémisme… et on perçoit très vite que les choses vont rapidement mal tourner.
En s’invitant à la table des fantasmes non assouvis de la femme, de la mère de cette famille impeccable, il va bousculer sans aucune limite l’ordre établi. Inutile d’en savoir plus car la puissance du film tient plus à la manière très particulière, à la fois distanciée et étrangement absurde dont cette invasion est racontée. Alex van Warmerdam se moque du conformisme de la société néerlandaise et de l’ennui auquel il conduit inévitablement.
Mise en scène radicale
Il le fait radicalement, sans concession en filmant frontalement et de manière très froide, sans aucune émotion apparente. Sa mise en scène est comparable à l’architecture de la maison du film, où ce quasi huis clos prend corps. Carrée, froide, pure et en béton brut. Une telle maîtrise n’empêche pas le chaos loin de là ! Mais, justement, en ne se tenant qu’à cette critique au vitriol des conventions bourgeoises, le propos de son film reste un peu vain. C’est dommage. On a plus l’impression d’assister à un exercice de style qui nous tient à distance qu’à un film qui nous emporterait totalement.
Avec Jan Bijvoet, Hadewych Minis, Jeroen Perceval, Sara Hjort Ditlevsen
2013 – Pays-Bas – 1h53
Les autres sorties du 20 novembre traitées par cine-woman :
Sur une île du Mississipi, où ils aiment se promener, jouer et rêver, Ellis et Neckborne, tous les deux 14 ans, repèrent, un jour un personnage étrange. Mud a une allure différente mais attirante : il ne vit de rien, armé seulement de son pistolet et d’une chemise qui le protège. Il fascine tant les deux ados qu’ils commencent à lui apporter à manger. Bientôt, il se confie à eux.
Mud prétend avoir tué un homme pour les beaux yeux de Juniper, qui vient justement de débarquer en ville. Des tueurs seraient à ses trousses. Avec l’aide des deux ados, Mud va remettre en marche un bateau que les deux jeunes lorgnaient. Mais Mud dit-il vrai ? Est-il aussi amoureux de Juniper qu’il le prétend ? Comment connaît-il tout ce monde sans que personne ne lui vienne en aide ?
Déjà vu
Inutile d’attendre trop de réponses de ce film qui en pose plus qu’il n’en apporte. Mud est certes un personnage atypique, mais le cinéma est plein de ces figures marginales attachantes, de ces rencontres improbables qui aident à grandir ou à changer de destin. Qu’importe finalement ce qu’il a fait ou non, il est du genre à retomber toujours sur ses pattes, à sauver sa peau in extremis sans grande conviction, ni ambition toutefois.
La réaction des deux gamins est un peu plus intéressante, surtout celle d’Ellis qui subit tous les jours la mésentente de ses parents alors que lui ne rêve que d’amour et qu’il interprète tout à cette aune.
Pour le reste, et malgré l’enthousiasme qu’il semble susciter, ce film à la mode laisse vraiment sur sa faim : on peine à s’intéresser à cette Amérique profonde, régie par la loi du Talion, parce que sa présentation est trop biaisée et irréaliste. Encore plus quand arrive le final aussi explosif, maladroit que malvenu et d’une violence complètement démesurée pour être crédible, alors que le film tente justement de décrire une certaine réalité sociale.
Mud est encore plus décevant que Les Bêtes du sud sauvage, film dans la même veine qui défendait un univers semblable, typique du Mississipi et de l’influence que sa nature a nécessairement sur le comportement de ses habitants. Mais, alors que l’autre film défendait un propos, le vide de celui-ci n’en est que plus sidérant. Même le jeu des acteurs vedettes semble artificiel : Matthew McConaughey n’est jamais subtil et parfois même grotesque, Reese Witherspoon n’a rien à défendre. Seuls les gamins (Tye Sheridan en tête) tirent dignement leur épingle du jeu. C’est peu.
Avec Matthew McConaughey, Reese Witherspoon, Tye Sheridan, Jacob Lofland, Sam Shepard
2012 – Etats-Unis – 2h10
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