Danielle Arbid adapte Passion simple, le roman d’Annie Ernaux en s’appuyant sur le jeu fougueux de son interprète principale : Laetitia Dosch. Torride.
D’attente et de sexe
« À partir du mois de septembre l’année dernière, je n’ai plus rien fait d’autre qu’attendre un homme : qu’il me téléphone et qu’il vienne chez moi. Tout de lui m’a été précieux, ses yeux, sa bouche, son sexe, ses souvenirs d’enfant, sa voix… ». Ainsi Hélène (Laetitia Dosch) résume-t-elle cette Passion simple qui la lie à Alexandre (Sergei Polunin), un homme d’affaires, inaccessible et mystérieux qui l’envoûte complètement.
Le film explore ces scènes d’attente, de retrouvailles puis d’éloignement qui fonde la relation éminemment sexuelle qui lie ce couple hors normes. Elle est divorcée, mère d’un jeune garçon. Il est marié et russe, souvent appelé loin de chez lui.
Passion simple ou l’exploration du désir au féminin
En adaptant le roman éponyme d’Annie Ernaux, Danielle Arbid donne brillamment à voir et sans tabou ce qui est rarement abordé au cinéma : le désir des femmes, la description de toutes les étapes de l’état amoureux et le fait pour une femme de se sentir vivante. Mais surtout, le point de vue féminin très juste face à la passion.
Passion simple est l’histoire simple et universelle que beaucoup de femmes ont vécu. Hélène a désiré puis passionnément aimé Alexandre . Dans cette passion, elle s’est peu à peu perdue de vue tant elle était soumise à son désir, à son plaisir et à celui de son amant. Elle s’est certes sentie vivante puis elle a souffert avant de désaimer et de se libérer, le cœur en miettes mais la tête haute.
Des corps à l’unisson
Hélène est une intellectuelle qui se laisse embarquer par une folle passion charnelle et émotionnelle, qui n’a pas les moyens ni l’envie d’y résister. Les scènes d’amour racontent chaque moment de cette passion. Elles sont filmées avec pudeur et beauté, sans gratuité ni jugement, comme une chorégraphie de l’intimité des corps qui se rencontrent, s’embrassent, s’embrasent, se donnent du plaisir.
Musique et lumière, tels des chapitres du film, reflètent judicieusement les ressentis d’Hélène en fonction de ce qu’elle traverse. Le visage du personnage évolue, illuminé par cette intensité qui l’anime de l’intérieur et presque morte à la vie dès que la douleur apparait. La douleur de l’absence, de l’attente, de la dépendance affective, du déséquilibre d’amour entre les deux, toutes les étapes de cette passion simple sont décomposées avec réalisme et tact. La plus grande réussite de Danielle Arbid est d’offrir au spectateur un regard jamais voyeur, mais bien empathique envers Hélène. Quitte à nous faire frémir de plaisir à sa place…
Sylvie-Noëlle
De Danielle Arbid, avec Laetitia Dosch, Sergei Polunin, Caroline Ducey, Grégoire Colin..
2020- France/Belgique – 1h39
Passion simple de Danielle Arbid a reçu le label Cannes 2020.
Lire aussi l’interview croisée de Danielle Arbid et Laetitia Dosch.