Il s’est fait un nom en composant les textes des chansons de Julien Clerc. Mais Etienne Roda-Gil était bien plus que cela. Ce que raconte Charlotte Silvera dans le documentaire hommage qu’elle lui consacre : On l’appelait Roda.
Le poète industriel
Le pari est audacieux. Consacrer un documentaire – passionnant – sur une figure de l’ombre, à la personnalité pourtant débordante. Mais la réalisatrice Charlotte Silvera s’y était engagée auprès de lui et elle est du genre à tenir parole. Contre vents et marées.
Tant mieux, car son essai, On l’appelait Roda, est vraiment intéressant. On découvre ainsi une figure marquante de la chanson française, un poète de la rime aux vers souvent abscons mais qui a marqué de son empreinte tout un pan de notre culture pop au sens populaire du terme. Alors que lui-même ne l’était pas.
Roda, l’éternel révolutionnaire
Qu’importe ! Ce fils de républicains espagnols, catalans même si on veut être précis, au caractère et aux combats bien trempés, mérite amplement qu’on s’attarde sur son destin et sur sa personnalité.
Charlotte Silvera le fait par le biais de leur longue amitié, des chansons qu’il a écrites (plus 700, toutes mises en musique), de ses hits – de Ce n’est rien à Jo le taxi en passant par Magnolias for ever ou Alexandrie, Alexandra -des chanteurs qui l’ont interprété – Julien Clerc, Vanessa Paradis, Juliette Greco ou Sophie Marceau… – et des personnalités qu’il a fréquentées.
La plus étonnante reste Roger Waters, bassiste et fondateur de Pink Floyd. Ensemble, ils ont eu un projet de comédie musicale sur la révolution française, Ca ira, qui n’a finalement que discrètement vu le jour en 2006.
L’ogre inspiré
On l’appelait Roda devient passionnant quand Roda-Gil revendique son anarchisme, l’engagement républicain de son père et la force qu’il en a tiré. Il aurait même écrit une comédie musicale sur le Che pour Johnny Halliday ! Son érudition et surtout la manière dont chacune de ses paroles était pensée en référence à l’interprète choisi sont aussi dévoilées.
Mais le film devient émouvant quand ses interprètes, tous, l’évoquent avec tendresse sans jamais pouvoir retenir l’émotion qui les étreint. Ils nous font regretter de n’avoir pas mieux connu cet homme, cet ogre inspiré à qui ce film rend une juste mémoire. On l’appelait Roda, ce film hommage qui mélange l’intime et l’histoire, l’Histoire et la pop.
De Charlotte Silvera, avec Etienne Roda-Gil, Julien Clerc, Vanessa Paradis, Roger Waters, Louis Bertignac…
2018- France – 1h37