Of men and war de Laurent Bécue-Renard raconte les dégâts humains de l’après-guerre. Ceux portés par les hommes qui en sont revenus et sur leur famille. Indispensable.
La guerre et ses après
Ce film n’est pas à proprement parler un film pour les femmes mais il les concerne tout autant. Of men and war est le second volet du travail documentaire de Laurent Bécue-Renard qui s’intéresse aux après-guerres. Pas au sens politique mais au sens des dégâts humains que les conflits armés engendrent, même une fois finis.
Après les femmes, les hommes
En 2001, il s’était d’ailleurs penché sur les femmes alors qu’il avait lui même vécu la dernière année du siège de Sarajevo. De guerres lasses traitait des traumas psychiques chez les jeunes veuves bosniaques. Dans Of men and War, il donne la parole aux vétérans des récents conflits en Irak et en Afghanistan.
Les douze ex-militaires que le réalisateur suit ici sont tous partis au front, motivés, prêts à en découdre (ça déjà ça fait peur). Ils en reviennent pour la plupart entiers, sains et saufs en tous cas, habilités à reprendre une vie normale. Sauf qu’ils ne le peuvent pas.
Of mena and war ou l’enfer de la vie
Leur quotidien est devenu un enfer, peuplé de démons et de fantômes. Il les pousse au mutisme et à la violence conjugale et familiale. De fait, la plupart assiste paralysés à la décomposition des familles qu’ils ont crées, au ratage de leur vie de couple, à la stupeur de leur conjoint face à leurs dérapages inexpliqués.
Un thérapeute, Fred Gusman, lui-même vétéran du Vietnam, a ouvert un centre pour les accueillir dans le nord de la Californie. Laurent Bécue-Renard y a vécu plus d’un an en partageant le quotidien de jeunes recrues. Avant de poser sa caméra, notamment lors des séances de thérapie de groupe.
L’éternel démon de la mort
Il a ensuite suivi ces hommes dans leur famille. Là, il a continué à dénouer leur parole. Il a tenté de comprendre comment ou plutôt si, un jour, ils pourront surpasser cette épreuve qui les a traumatisés.
De facture simple, le film suit au plus près ces hommes, leurs témoignages dérangeants en s’attachant vraiment à chaque cas personnel. On comprend alors aisément les fractures psychologiques, puis morales et affectives qui condamnent ces jeunes gens, poussés vers une sorte d’instinct de mort ou de destruction. Après avoir servi de chair à canon, ils deviennent au pire des suicidés en suspens, au mieux d’étranges créatures en quête de leur propre humanité. C’est incontestablement le film le plus pacifiste vu depuis longtemps…
Documentaire de Laurent Bécue-Renard
2014 – France/Suisse – 2h22
© Alice Films