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Les Tops 5 de Leonor Serraille

 Les femmes et le 7ème art, c’est une longue histoire mal connue. Pour l’honorer, Cine-Woman demande à tou(te)s les 5 films de femmes et les 5 rôles féminins qui les ont marqués. Leonor Serraille, la réalisatrice de Jeune Femme , en salle le 10 mai 2017, nous a confié ses listes.

Les choix de Leonor Serraille

Un premier film, Jeune femme et déjà une sélection officielle au 70e Festival de Cannes dans la catégorie des talents émergents, Un Certain regard.
Leonor Serraille, la réalisatrice de Jeune femme
Jusqu’à présent, Leonor Serraille peut revendiquer un parcours sans fautes. Titulaire d’une maitrise de lettres, elle intègre ensuite la promotion 2013 de la Femis  au département scénario. Son style alerte, moderne, féminin lui vaut de participer à l’écriture de plusieurs courts-métrages, notamment à celui de Sonia Franco, Petite soeur.
En 2016, Leonor Serraille écrit et réalise son premier court-métrage Body, une histoire de soeurs avec l’actrice Nathalie Richard dans le rôle principal.
Elle la retrouve en mère glaçante dans Jeune femme, son premier long qu’elle aurait écrit à la Fémis et tourné enceinte de son premier enfant. Il raconte le parcours de Paula qui, délaissée par son compagnon, apprend à devenir autonome. Elle a confié le premier rôle à une Laeticia Dosch survoltée. Comme quoi, la direction d’acteurs est un autre des talents de cette parisienne désormais installée à Lille.
Leonor Serraille fait partie de cette nouvelle génération de réalisatrices, formées dans les meilleurs écoles dont on attend qu’elle apporte un vent d’air frais et féminin au cinéma français.
En attendant de connaître l’accueil réservé à Jeune femme, Leonor Serraille a accepté de jouer le jeu des Tops 5 pour Cine-Woman. Ses choix sont étayés, ses goûts sont sûrs et cosmopolites. Les voici.

Mes 5 films réalisés par des femmes préférés 

1 – La forêt de Mogari de Naomi Kawase (2007)
La forêt de Mogari de Naomi Kawase

Pour la plongée avec les éléments et l’étrange bien-être qu’on ressent en sortant du film, alors qu’on a été confronté à la mort, au deuil, à la solitude. Toute son œuvre est mystérieuse et magique.

2 – Wanda de Barbara Loden (1970)
Wanda de et avec Barbara Loden

La fusion merveilleuse entre le fait-divers, l’autobiographie et le portrait de femme. L’audace, à contre-courant des discours féministes, de montrer la déroute d’une Wanda livrée à elle-même, fragile, influençable.

3 – La leçon de piano de Jane Campion (1993)
Holly Hunter et Rose McIver dans La leçon de piano de Jane Campion

Pour les face-à-face entre la violence des émotions et la finesse des sentiments. Entre les corps nus et les corps cachés. Entre le silence de l’héroïne et la musique, d’une telle intensité.

4 – A bas bruit de Judith Abitbol (2013)
Nathalie Richard dans A bas bruit de Judith Abitbol

La parfaite équation entre une réalisatrice, un concept et une comédienne habitée, fantastique, Nathalie Richard.

5 – Wendy and Lucy de Kelly Reichardt (2009)
Michelle Williams dans Wendy et Lucy de Kelly Reichardt

Je pense souvent à ce film, très beau, à son économie d’effets, de mots, de situations. La modestie du personnage, la sécheresse de son périple, la grande solitude mais quand même, lumineux, l’espoir de l’entraide.

5 prestations d’actrices inoubliables

1 – Gena Rowlands dans Opening Night de John Cassavetes (1977)
Gena Rowlands dans Opening Night de John Cassavetes

Pour sa performance , à la fois animale, cérébrale, totale. J’ai beau connaître le film par cœur,  quand vient le moment où elle baisse ses lunettes dévoilant les blessures qu’elle a autour des yeux , je suis saisie par l’intensité de la découverte. Peut-être parce qu’avec cette actrice on oublie tout, on est rivé à l’instant présent.

2- Thérèse M’Bissine Diop dans La Noire de…  de Sembène Ousmane (1966)
Thérèse M’Bissine Diop dans La Noire de… de Sembène Ousmane

Thérèse M’Bissine Diop compose un personnage à la fois doux et rebelle, une figure de femme libre. Cataloguée « actrice engagée » elle n’a pas eu accès aux rôles qu’elle méritait. Elle fait passer une quantité de choses impressionnante avec une économie, une pudeur, une retenue, et pourtant tout peut vriller en un seul regard qu’elle pose sur celle qui l’exploite.

3 – Anna Thomson dans Sue perdue dans Manhattan de Amos Kollek (1998)
Anna Thomson dans Sue perdue dans Manhattan

Tout est cassé chez Sue et elle rayonne pourtant de dignité, d’humour, de générosité. A chaque fois, c’est une choc : l’interprétation d’Anna Thomson me bouleverse.  Ce personnage – et cette actrice – m’accompagnent dans la vie, et sont liés aussi à mon envie de faire du cinéma :  passer du temps avec de belles personnes qui s’ignorent.

4 – Yoon Jung-Hee dans Poetry de Lee Chang-Dong (2010)
Yoon Jung-Hee dans Poetry de Lee Chang-Dong

Yoon Jung-Hee semble touché par la grâce comme le personnage qu’elle « vit ». Elle chemine autant dans la magie de l’enfance, la naïveté, l’insouciance, la joie que dans le silence, le tragique, la mort. Elle dévoile un paysage intime la fois concret, simple et dérangeant. C’est assez éblouissant.

5 –  Liv Ullman chez Ingmar Bergman ou Hedy Lamarr dans Extase de Gustav Machaty (1933)

 

Bibi Andersson et Liv Ulllman dans Persona d’Ingmar Bergman (1967)

Difficile de trancher pour Liv Ullman chez Bergman ou alors peut-être Hedy Lamarr dans Extase de Gustav Machaty (1933).

Hedy Lamarr dans Extase de Gustav Machaty (1933)

Le courage, à 19 ans, de se livrer toute nue devant une équipe masculine.  Hedy Lamarr était aussi intéressée par mille autre choses et a fait breveter un système de communication pour engins radio-guidés…

© Patrick Gaillardin – Haut et court – Gemini Films – Les Films du Paradoxe – Epicentre – Diaphana Distribution

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