Les tops 5 d’Amandine Lagache
Les femmes et le 7ème art, c’est une longue histoire mal connue. Pour l’honorer, Cine-Woman demande à tou(te)s les 5 films de femmes et les 5 rôles féminins qui les ont marqués. Amandine Lagache, fondatrice de Kiziband, plateforme innovante de VOD et de financement de films intégrant la blockchain dans le cinéma, nous a confié ses listes.
Les choix d’Amandine Lagache
Du cinéma de son enfance, Amandine Lagache, fondatrice de Kiziband, a surtout gardé des images traumatisantes : la scène de l’émasculation du Germinal de Claude Berri vu trop jeune, vers l’âge de 8 ans. Ou encore celle de Mona, héroïne sans attaches de Sans toit ni loi d’Agnès Varda écroulée dans un fossé. Elle se souvient aussi des injonctions de ses parents, vignerons champenois, à se cultiver, sans regarder la télévision. Mais aussi, heureusement d’héroïnes telles Lucie Aubrac l’ont marquée positivement et durablement.
Au lycée, dans un pensionnat de Reims, elle rencontre Marylène Andrin, qui deviendra réalisatrice au Luxembourg et avec qui elle travaillera un moment. A Sciences Po Lyon qu’elle intègre en 2003, elle remarque immédiatement qu’une partie des locaux a servi de décor de tournage à L’Armée des Ombres de Jean-Pierre Melville.
Innover pour trouver sa voie au cinéma
Le cinéma l’intéresse c’est sûr. Encore faut-il y trouver sa voie. Amandine Lagache se forme au Centre Européen de Formation à la Production de Films (CEFPF), travaille comme assistante de production à la post-prod de La Vie d’Adèle d’Abdellatif Kéchiche.
Son histoire familiale la rattrape alors et la pousse à changer radicalement de vie. Elle s’installe à Lorient en septembre 2016 et envisage d’innover dans le domaine du financement des films. En janvier 2018, elle entend parler de la blockchain qu’elle veut adapter au cinéma. En avril 2018, elle lance à Rennes Kiziband, inspiré du mot breton kizidigezh qui signifie sensibilité.
Kiziband, kezako?
Kiziband est un projet évolutif et innovant qui vise à intégrer la technologie de la blockchain au financement des films en en dématérialisant les droits, en autonomisant les remontées de recettes, en limitant la piraterie (puisque la blockchain est inviolable) et en incitant des acteurs de nature différentes à investir dans le cinéma. Bref, en devenant un nouveau guichet pour les maisons de production.
« Mon projet vise à renouveler les propositions de cinéma en intégrant des projets autofinancés ou de jeunes auteurs de toute l’Europe», explique-t-elle. Alors qu’il se met progressivement en place, son projet se matérialise pour le moment sous la forme d’une plateforme de VOD d’une quinzaine de courts-métrages. « C’est un premier catalogue qui aide à faire vivre des films même longtemps après leur première diffusion », poursuit-elle. « A terme, Kiziband a vocation à produire et diffuser des films en inventant un nouveau modèle qui optimise le système français de financement grâce à la blockchain ». Pour y parvenir, sa start-up a encore besoin de lever des fonds pour développer son contenu, affiner sa ligne éditoriale qui veut privilégier la création féminine, la vidéo et les questions de genre et commencer à tester son modèle innovant de financement sur de nouveaux projets. Elle envisage même de créer un festival sur le sujet à Vannes.
Tout en s’y attelant, Amandine Lagache continue à fréquenter assidûment les salles de cinéma et les festivals rennais, tels Travelling, et à contribuer à Cine-Woman. Voici ses choix de films de réalisatrices et des héroïnes et actrices préférées.
Mes cinq films de réalisatrices préférés
1- Sans toit ni loi d’Agnès Varda (1985)
Comme souvent pour les chocs cinématographiques, c’est arrivé sans prévenir. Je me souviens d’une image de Sandrine Bonnaire près d’un fossé et je me suis demandé comment quelqu’un pouvait aussi bien exprimer ce que je ressentais.
2- Papicha de Mounia Meddour (2019)
Un des films récents qui m’a saisi, surtout par son personnage principal que j’ai aussi mis dans mon top 5 des rôles féminins.
3- Virgin suicides de Sofia Coppola (1999)
Vu à l’adolescence. Pour la tension de ce huis-clos familial dans lequel la sexualité est un tel tabou qu’elle devient omniprésente.
4- Lady Chatterley de Pascale Ferran (2006)
Pour ce que le film dit des rapports de classe dans cette société britannique et la sensualité et la sexualité qui les dépasse.
5- We need to talk about Kevin de Lynne Ramsay (2011)
Ce film a pour sujet un couple confronté à un enfant « déviant » voire psychopathe. Sans doute une petite revanche par procuration sur mes parents. L’image est aussi très soignée. Tilda Swinton est comme souvent très convaincante.
Cinq prestations d’actrices inoubliables
1- Meryl Streep dans The Hours de Stephen Daldry (2002)
Un des films qui m’a le plus marqué et qui m’a fait découvrir Virginia Woolf . J’avais 17 ans et je venais de rentrer en hypokhâgne. Le lendemain à la cantine, avec les copines, on répétait la réplique de Meryl Streep : « Sally, I gonna get the flowers myself » en boucle. C’est aussi une des phrases de Clarissa dans Mrs Dalloway. Les trois rôles féminins de ce film sont très beaux, mais celui de Clarissa est vraiment touchant. Cette femme qui essaye de tout tenir ensemble : le passé, le présent, la famille, son métier d’éditrice et qui ne veut pas laisser qu’on oublie son ami.
2- Cate Blanchett dans Bandits de Barry Levinson (2001)
Cate Blanchett joue un personnage de femme amoureuse déprimée voire dépressive, qui cuisine sur du Bonnie Tyler. Pour son énergie si particulière faite d’excès et d’abattement.
3- Patricia Arquette dans True Romance de Tony Scott (1993)
J’ai beaucoup de tendresse pour Alabama, ce personnage amoureux et prêt à tout qu’interprète Patricia Arquette.
4- Jennifer Lawrence dans Joy de David O. Russell (2015)
Cette fille douée ploie sous les injonctions de la famille. Elle n’est pas prise au sérieux, vit mal entourée et se révèle. Jouissif !
5- Lyna Khoudri dans Papicha de Mouna Meddour (2019)
Elle montre avec son personnage que la détermination n’est pas incompatible avec la tendresse. Celle qu’on surnomme Papicha traverse des choses très violentes. Elle vacille parfois mais elle ne dévie pas de son chemin.