En Tunisie, une jeune femme est violée par des policiers. La belle et la meute, la deuxième fiction de Kaouther Ben Hania, raconte son parcours du combattant pour faire reconnaître ses droits.
Le droit d’être victime
Durant une soirée étudiante, Mariam rencontre un jeune homme. Ils s’éclipsent sur la plage à proximité.
Quelques heures plus tard, Mariam et Youssef errent dans la rue.
Elle est un peu défaite, semble très apeurée. Il lui conseille d’aller voir un médecin pour obtenir le certificat qui lui permettrait de déposer plainte. Sur la plage, Mariam a été séquestrée et violée par des policiers.
La belle et la meute, adaptée d’une histoire vraie
Commence alors une longue descente en enfer au cœur des services publiques tunisiens : l’hôpital, les postes de police… Un labyrinthe dans lequel Mariam va devoir naviguer seule et à vue, si elle veut faire respecter ses droits et retrouver un peu de sa dignité.
Pour sa deuxième fiction, la réalisatrice Kaouther Ben Hania s’attaque à un sujet fort et universel. Et très féminin. Comment faire valoir ses droits quand le bourreau est justement celui qui est chargé de les faire respecter ? Pour cela, elle a choisi de s’inspirer d’une histoire vraie. Celle que Meriem Ben Mohamed a vécu et raconté dans un livre : Coupable d’avoir été violée, écrit avec Ava Djamshidi. Mais que Kaouther Ben Hania se défend d’en avoir fait une adaptation.
Seule contre tous
Le cas de Mariam est en tous points exemplaire. Jeune femme plutôt sage, elle s’émancipe légèrement lors de cette soirée. Un enchaînement de circonstances vont jouer contre elle : sa robe est provocante, son ami protecteur mais ambigu… Surtout la police la méprise, la maltraite et lui ment.
La plupart des policiers tente de préserver une institution moquée et partiale, pour ne pas dire corrompue. Mariam sera seule, contre tous. Contre une meute léguée contre elle qui les met en danger. Mais, elle tient bon.
Entre fiction et documentaire
Kaouther Ben Hania signe ici sa deuxième fiction. Auparavant, elle avait réalisé deux documentaires et deux courts-métrages qui interrogeaient la place de la femme dans la société tunisienne actuelle. Le dernier, Le challat de Tunis, formidable, jouait avec intelligence et humour avec les frontières du réel et de la fiction.
La réalisatrice est moins à l’aise avec un récit fictionné. Le choix du séquençage en 9 chapitres semble arbitraire. Et l’ellipse du départ beaucoup trop brutale. Sa direction d’acteurs est imparfaite. Mariam Al Ferjami, la superbe jeune actrice qui incarne Mariam est inégale, et Ghanem Zrelli, qui joue Youssef trop lisse. Enfin, la définition des personnages, les policiers notamment, est trop manichéenne et leurs menaces pas assez ambiguës.
Reste toutefois un sujet fort, très fort, traité avec pertinence et simplicité. Et une conscience vivace des sujets qui minent la vie des femmes aujourd’hui.
De Kaouther Ben Hania, avec Mariam Al Ferjami, Ghanem Zrelli, Noomane Hamda…
2017 – France/Liban/Tunisie/Suède/Norvège – 1h40
La belle et la meute de Kaouther Ben Hania a été présenté le vendredi 19 mai dans la sélection officielle Un certain regard.