Hedy Lamarr : from Extase to wifi
Consacrer un documentaire à la femme incroyable que fut Hedy Lamarr, voila le propos de Bombshell : the Hedy Lamarr story retitré Hedy Lamarr : from Extase to wifi d’Alexandra Dean, présenté au Festival2Valenciennes. Dommage qu’il n’arrive pas à la cheville de l’actrice et inventrice qu’elle a été.
Hedy Lamarr, l’éternelle incomprise
Sur le papier, le projet est excitant. On va enfin savoir, saisir qui a été Hedy Lamarr, cette actrice viennoise audacieuse, qui a autant brillé par sa beauté à Hollywood qu’en inventrice de génie. On lui doit le saut de fréquence par étalement des spectres qui permet au téléphone portable, au wifi ou au GPS de fonctionner et le premier orgasme filmé en gros plan.
Le film repose sur un atout majeur (qui tombe pourtant comme un cheveu sur la soupe). Le journaliste Fleming Meeks du magazine Forbes aurait découvert derrière une poubelle (!) des cassettes qui contiennent la dernière interview audio d’Hedy Lamarr. Un matériau précieux dont il se sert pour écrire l’article qui la sort de l’oubli en 1990 et qui révèle pour la première fois l’invention géniale dont elle est l’auteur et dont elle n’avait jamais fait mention.
Des documents rares
Toutes les étapes de sa vie hors norme sont retracées dans ce documentaire. Surtout son enfance et son ingéniosité créative, moins sa carrière d’actrice. Il brille par tout un tas de documents inédits, de photos d’elle à Vienne, avec son père et son premier mari, qui furent déterminants dans la suite de sa carrière. Il compte aussi de nombreux et très courts témoignages actuels qu’on aurait aimé justifiés.
Pourquoi Peter Bogdanovitch ? Pourquoi Diane Kruger? – si, elle, je sais. Elle prépare une série sur Hedy Lamarr avec Fatih Akin, the Hedy project-. Pourquoi Mel Brooks? Parce qu’il avait ironiquement baptisé Hedley Lamarr un des personnages du Shérif est en prison, qu’elle n’a pas apprécié et l’a poursuivi en justice. Mais encore faut-il le savoir.
Des témoignages inédits
Il y a aussi les témoignages de ses biographes (les meilleurs là), et de ses deux enfants qui, eux-mêmes, ont du mal à définir leur mère. Sa petite fille avoue ne l’avoir croisée que deux fois dans sa vie.
Sur le tard, celle qui fut sacrée la plus belle femme du monde avait tellement abusé de la chirurgie esthétique qu’elle s’était retirée en Floride et refusait de voir jusqu’à ses propres enfants. Les rares images des dégâts chirurgicaux (qui ne sont malheureusement pas les derniers) font peine à voir.
Une personnalité hors norme
Reprenons au début, mais rapidement, car Hedy Lamarr fait évidemment partie des 50 femmes de cinéma. Jeune fille viennoise sublime, Hedwig Eva Maria Kiesler défraie la chronique, à 17 ans, dès son troisième film, Extase de Gustav Machaty, parce qu’elle y court nue et simule un orgasme. Sa renommée est instantanée et internationale.
Un marchand d’armes l’épouse, lui présente ses amis (le staff d’Hitler, Mussolini..) et la séquestre. Elle s’échappe de manière rocambolesque, se retrouve à Londres puis sur le paquebot qui ramène Louis B. Mayer aux Etats-Unis. Il lui signe un contrat et elle débarque à Hollywood où sa carrière ne sera pas de premier plan.
« Elle était trop belle et trop intelligente » entend-on à son égard. Elle rencontre le succès avec Casbah qu’elle tourne avec Charles Boyer, avec La Danseuse des Folies Ziegfeld ou en interprétant la vénéneuse Dalila du péplum de Cecil B. de Mille, son plus grand rôle.
Double jeu
À vrai dire, aucun réalisateur n’a su prendre sa mesure. Aucun mari -elle en a eu 6-, aucun amant non plus. Elle adopte un enfant, s’en sépare, en a deux autres qu’elle tient aussi à distance. La faute, selon ce documentaire, au Docteur Feelgood qui rôde à Hollywood et dont elle aurait abusé des traitements.
Peut-être… elle s’ennuie tellement à Hollywood qu’elle se concentre, avec le compositeur George Antheil, à inventer ce fameux saut de fréquence qui rend indétectable le contenu des signaux radio. À ce sujet, le documentaire est particulièrement pédagogique. Redondant même. Pourtant, malgré l’intérêt de son invention dont elle dépose le brevet, elle n’en fera mention qu’en 1990 et ne sera honorée qu’en 1997.
Un documentaire formaté et incomplet
La suite est approximative. Disparue des radars du cinéma et des prouesses technologiques, Hedy Lamarr tombe dans l’oubli. Le documentaire mentionne à peine ses vols à l’étalage, son esprit frivole ou particulièrement procédurier qui garantit pourtant son niveau de vie élevé jusqu’à sa mort. Il s’attarde sur son ingéniosité qui ne se limite pas au saut de fréquence et sur ses origines juives qu’elle aurait reniées.
Un parti pris déséquilibré qui ne livre presque aucune clé sur son personnage qu’elle décrit elle même comme original, mystérieux, difficile à cerner. Et s’il évoque, révèle même quelques faces sombres de sa riche personnalité , il reste tellement en surface, multipliant des témoignages pas tous intéressants qu’on ne saisit pas grand chose de ce qu’elle fût. Du coup, on reste subjugué par sa beauté, son indiscipline et son esprit ingénieux. Mais, le documentaire sur Hedy Lamarr reste à faire.
D’Alexandra Dean avec Hedy Lamarr, Diane Kruger, Diane Kruger, Fleming Meeks, Mel Brooks, la famille Loder…
2017 – Etats-Unis – 1h26
Bombshell : the Hedy Lamarr story était en compétition documentaire au festival2Valenciennes et sortira en salle le 6 juin 2018.