Les figures de l’ombre
Quelle a été la place des femmes dans la conquête spatiale américaine? Les figures de l’ombre en réhabilitent quelques unes : les trois femmes noires qui ont permis à John Glenn de faire trois fois le tour de la terre en orbite.
Des femmes à la conquête des étoiles
Elles s’appellaient Katherine Johnson, Dorothy Vaughn et Marcy Jackson. Toutes trois ont la bosse des maths. Elles sont été des scientifiques de premier plan au début des années 1960. Grâce à elles et à quelques autres, la Nasa a repris à l’URSS le leadership dans la guerre des étoiles.
Car ce sont elles qui ont réussi à mettre en orbite John Glenn en 1962, grâce à leurs calculs et à leur intelligence mathématique. Accessoirement, elles sont noires. Elles ont donc, en plus, été directement victimes de la ségrégation de l’époque. Ce que leur talent leur a aussi permis de combattre.
Garder la mémoire des femmes qui ont oeuvré pour la NASA
Leur histoire était passée aux oubliettes, balayée par la gloire de Neil Armstrong, Buzz Aldrin ou de John Glenn, décédé en décembre 2016. Mais, Margot Lee Shetterly, dont le père travaillait à la NASA, l »a exhumée. D’abord dans un livre, Les figures de l’ombre, qu’elle a écrit à partir des entretiens, des archives et des recherches qu’elle a menées.
Grâce à deux subventions, elle a monté le Human Computer Project pour archiver tout le travail de ces pionnières de la Nasa. Elle a enfin envoyé l’histoire à la productrice Donna Gigliotti avec l’espoir de « captiver l’imagination du grand public ». C’est la scénariste Allison Schroeder, ex-matheuse de haut niveau et ancienne stagiaire de l’agence spatiale américaine, qui a écrit le scénario.
Sortir de l’ombre
Il suit l’histoire parallèle de ces trois femmes, Katherine, Dorothy et Marcy, trois brillants esprits scientifiques qui vivotaient dans le West Computing, une aile isolée de l’agence spatiale américaine. Y étaient regroupées des équipes de femmes scientifiques noires qui travaillaient et vivaient entre elles. Leurs bureaux était situés en Virginie, un état où les lois ségrégationnistes sont, à l’époque, encore en vigueur.
Mais, l’avancée que prennent les soviétiques dans la conquête spatiale en lançant Spoutnik va brusquement les faire sortir de leur sous-sol. La priorité du gouvernement américain est de reprendre le leadership dans la course aux étoiles. Face à la pénurie de scientifiques, tous les talents sont sollicités. Même ceux de femmes noires.
Les figures de l’ombre : ces reines des chiffres
Ce sera la chance de Katherine, Dorothy et Marcy. Pour la première, les chiffres et les nombres n’ont aucun secret. La seconde calcule plus vite qu’un ordinateur et sait parfaitement les programmer. Elle sera la première superviseuse noire de la NASA. La troisième a été la première afro-américaine à intégrer l’université qui formait les ingénieurs da l’agence et à en ressortir diplômée.
Quand on vient les chercher, c’est la panique à la NASA. Puisque que personne n’arrive à résoudre les équations qui permettront à coup sûr la mise en orbite d’un être humain. Leur intégration au sein des équipes d’ingénieurs blancs et exclusivement masculines est difficile. Rien ne leur ait donné : ni un salaire équivalent, ni la considération, ni mêmes des toilettes qu’elles peuvent fréquenter.
Des destins hors pair
Qu’à cela ne tienne, elles s’accrochent, s’entraident – l’une d’elle est seule avec trois enfants- et sont toutes soutenues par Dorothy qui a un vrai talent de chef et de négociatrice. Elles bénéficient aussi de la bienveillance de leur chef, Al Harrisson qui reconnait immédiatement la suprématie de Katherine sur les chiffres. Et celle de Kazimierz Czarnecki qui pousse Mary à devenir ingénieure. Quel que soit les obstacles à franchir (et ils sont nombreux).
Le film raconte donc leur parcours, en mêlant aussi un peu de leur vie personnelle. Si la réalisation est conventionnelle, leur destin à toutes les trois est suffisamment exceptionnel pour qu’on en fasse peu de cas. L’essentiel est ailleurs : dans le modèle de ces scientifiques brillantes qu’il met en avant. Que d’autres petites filles ou esprits brillants aient enfin sous les yeux que ces carrières-là leur sont aussi offertes.
De Theodore Melfi, avec Taraji P. Henson, Octavia Spencer, Janelle Monae, Kevin Costner, Kirsten Dunst…
2016 – Etats-Unis – 2h06