Alice Odiot et Jean-Robert Viallet, tous deux documentaristes, ont obtenu l’autorisation de filmer la vie à la prison des Baumettes. Leur film, Des hommes, est sélectionné à l’Acid 2019, à Cannes.
L’absurdité carcérale
Durant 23 jours, Alice Odiot et Jean-Robert Viallet ont obtenu l’autorisation de filmer aux Baumettes, une des prisons les plus connues de France. Elle est aussi réputée pour ses conditions de détention jugées « inhumaines ». Sans commentaire ni explication, leur caméra se promène dans la centrale. Sans suivre un détenu en particulier mais en passant des uns aux autres.
Que dit ce beau film, aux images et au cadre très soignés, que nous ne sachions déjà ? Que la prison de Marseille est particulière, selon les témoignages, et qu’il règne une violence que l’on ne verra jamais. Des détenus y sont morts récemment tués par d’autres hommes incarcérés, certains sont attaqués au couteau. Nous, nous n’assisterons qu’à des convocations, remises dans le « droit chemin » de prisonniers condamnés quelques jours au mitard parce qu’on a retrouvé un téléphone portable ou une boule de shit dans leurs poches.
La prison des Baumettes, un univers en soi
La plupart ont des casiers judiciaires longs comme le bras – déjà quatre condamnations pour un jeune père de famille de 19 ans, 44 pour ce vieux briscard qui cherche toujours à 50 ans à avoir le regard ( l’approbation ?) de sa mère… Si ce documentaire avait pour mission de prouver que la prison et son fonctionnement actuel nagent en pleine absurdité, on le savait déjà. Tant elle ne parvient pas à éviter la récidive. Ce qu’on perçoit, et qui semble nouveau, c’est plutôt que c’est un système devenu quasiment autonome qui s’entretient et semble se suffire à lui-même.
Un monde clos porté par des femmes
L’autre surprise est la présence massive de femmes au sein d’une prison d’hommes. Elles y sont du bon côté des barreaux, certes. Mais ce sont elles qui sont aux manettes, de l’infirmerie, de la distribution des médicaments, aux jugements, aux accompagnements sociaux… Elles montrent toutes des capacités d’écoute et une vraie patience face aux détenus. Même si elles font très bien le travail, ce qui n’est pas en question ici, on sait qu’un univers est majoritairement féminisé quand il est déserté par les hommes. Et que d’office, il se paupérise et n’est plus en tête des priorités. En un mot, l’univers carcéral n’est donc pas prêt de changer.
Documentaire d’Alice Diot et Jean-Robert Viallet, avec le personnel et les détenus de la prison des Baumettes
2019 – France – 1h30
Des hommes d’Alice Diot et Jean-Robert Viallet est sélectionné à l’Acid 2019 et sera présenté à Cannes le 16 mai. Sa date de sortie en salle n’est pas encore connue.