Comme un avion
Un homme en crise de la cinquantaine décide de larguer les amarres. Voilà Comme un avion, la nouvelle comédie pleine de charme de Bruno Podalydès. Réjouissant!
L’art de la fugue
Michel, la cinquantaine séduisante, s’ennuie un peu dans sa vie. Il traîne au boulot, n’aime pas les anniversaires surprises et regrette que tout le monde ne le perçoive que comme un fan d’aviation. Il n’a jamais volé mais prendrait pourtant bien l’air.
En boucle
En cachette de ses proches, il se prend de passion pour le kayak. Et soudain, cette modeste embarcation en bois et en toile dont il acquiert toutefois un modèle de luxe, devient le moyen d’échapper à sa mélancolie… sans qu’il ne parvienne toutefois à sauter le pas.
Sa femme va l’y pousser. Et commence alors une parenthèse de vie, une aventure modeste, confortable et qui pourtant lui donnera la force de continuer de vivre. Sereinement.
Au fil de l’eau et du temps
Dans Comme un avion, Bruno Podalydès invente un personnage d’homme dans la cinquantaine, jamais vu au cinéma. Hors de tout clichés et de toutes références connues, son Michel n’est ni un loser magnifique – il a un boulot, une femme aimante et qu’il aime, une famille -, ni un entrepreneur féroce à qui tout réussi.
Michel est nonchalant. Il a tendance à rêver sa vie plutôt qu’à la vivre mais sans en être aigri. Il ne recherche pas les vents ascendants et préfère se laisser porter par le courant.
Comme un avion et hors clichés
Avec l’humour et la poésie qui le caractérisent, Bruno Podalydès s’est écrit un personnage sur-mesure, héros parfois accompli, parfois terrorisé par son destin, plus apte à réfléchir sa vie qu’à suivre son instinct. Et c’est formidable !
Qu’enfin un auteur sorte de la dichotomie habituelle, qu’il centre un film sur une personnage transverse, velléitaire et qu’il parvienne à en faire un homme attachant, fantasque est touchant, presque séduisant. Et qu’il le joue avec le naturel qui le caractérise est encore plus amusant.
Une femme intelligente
Sa femme aussi, jouée avec une ironie gracieuse par Sandrine Kiberlain, est délicieusement peinte. Ni hystérique, ni dépressive, ni autoritaire, ni dupe, elle s’amuse des errances de son mari et comprend que c’est en le poussant à s’éloigner, à prendre l’air que leur amour en ressortira grandi.
Parce que leur histoire est avant tout bâtie sur leur complicité et leur compréhension mutuelle, elle sait intimement que cette parenthèse pas forcément enchantée sera aussi un point de ralliement.
La Podalydès Touch
Tout cela ne serait rien sans la Podalydès touch, cette observation amusée de la vie, ce sourire entendu qui dévoile nos forces et nos travers et que le scénariste et réalisateur possède en maître en se l’appliquant d’abord à lui-même. Certes, Michel veut de l’aventure… mais il a aussi un besoin frénétique de posséder le dernier modèle d’un équipement surabondant qui le rassure (et même s’il n’a qu’une très vague idée de ce à quoi ça va lui servir).
Quant au réalisateur, il ne peut s’empêcher de créer des personnages complètement décalés joués par Pierre Arditi, Michel Villermoz qui ajoutent une touche singulière à son aventure du bout du chemin. Et se donne le beau rôle en tant qu’acteur.
Sensuel et sans suite
Tout en retrouvant ici un peu du ton de Liberté Oléron, qui parlait aussi d’une envie d’ailleurs et d’échappatoire par la navigation, mais qui virait à la tempête, Bruno Podalydès semble apaisé.
Désormais, il s’intéresse en homme mûr et tendre aux femmes, à plusieurs femmes et se tourne vers une sensualité revendiquée –et certaines scènes, notamment celle des post-it est bigrement sensuelle – qui donne encore plus de poésie à cette parenthèse enchantée. Réjouissant !
De Bruno Podalydès, avec Bruno Podalydès, Sandrine Kiberlain, Agnès Jaoui…
2015 – France – 1h45
© Anne-Francoise Brillot – Why Not Productions