Clic-clac, le nouveau roman de Nathalie Azoulai, au titre saugrenu mais justifié, met en scène une réalisatrice qui peine à tourner son nouveau film.
Clic-clac ? Comme le déclic de l’appareil-photo? Non, affirme au début de son neuvième roman Nathalie Azoulai. Comme le canapé, plus trivialement. Ou plus tard comme la scène fatidique que son héroïne, la grande cinéaste Claire Ganz, veut mettre en boite.
Il faudra lire ce livre et cette plongée érudite dans les affres et les empêchements créatifs pour avoir le fin mot de l’histoire. Sachez seulement que Claire Ganz est en panne sur son film. Elle est coincée par une scène ultime de rupture amoureuse que ses acteurs n’arrivent pas à jouer.
Révélateurs
L’une des clés de ce roman à intrigues qui avance masqué, tient dans la mort récente de la mère de Claire Ganz. Et dans l’hommage que sa fille tient à lui rendre avec son nouveau film. Y parviendra-t-elle ou l’enjeu est-il trop émotionnel?
C’est en fouillant dans ses souvenirs de cinéma, à travers trois scènes qui se répondent et qu’on meurt d’envie de revoir, que la cinéaste dénouera ses blocages. Le cheminement n’est pas aisé mais pertinent. Il mérite une lecture attentive, une mémoire visuelle et émotionnelle forte. L’exigence est bienvenue, surtout quand elle nous invite à revoir de grands films.
Clic-clac ou l’analyse d’un regard féminin
Il faut passer les premiers chapitres, la posture un peu agaçante de cette Claire – et la manière dont elle défend sa réputation auprès des journalistes notamment – pour glisser au cœur du roman. Et là, la lecture en devient délectable, référencée mais accessible. Elle offre un éclairage intelligent et nouveau sur des films que nous n’aurions pas forcément analysé, ni regardé ensemble. Mais Nathalie Azoulai nous y pousse et avec raison.
L’écrivaine n’épargne pas non plus les débats actuels et légitimes sur la place des femmes dans le milieu du cinéma. Sans le nommer, elle aborde ce fameux female-gaze. « Je fais ce film comme un cri de guerre pour qu’on cesse de nous vendre des générations de filles transies », s’explique à un moment Claire Ganz. Et c’est un des enjeux du film. Comme l’est celui de rendre hommage à une mère qu’on découvre parfois après sa mort mais qui continue à nous révéler à nous-même. Telle une photo.
Talents
Clic-clac est un roman subtil qui s’enrichit d’une nouvelle profondeur à chaque lecture. Et l’un des tout meilleurs écrits sur la création cinématographique, sur un film en train de se tourner. Gageons que Nathalie Azoulai le vit en parallèle, elle qui a déjà écrit depuis Clic-Clac deux autres livres – En découdre et Juvenia – et participer à l’écriture de scénarios, auprès de Jean-Xavier de Lestrade notamment.