A bigger splash
A bigger splash est un remake de La Piscine de Jacques Deray commandé par le StudioCanal. Un mal pour un bien?
Une piscine vide
Fallait-il faire un remake de La Piscine de Jacques Deray, un film qui a sonné les retrouvailles de Romy Schneider et d’Alain Delon et qui allait faire d’elle la grande actrice du cinéma français des années 1970 ?
Même à la fin des années 1960, parler de désir plus ou moins assouvi, de sexe latent et de couple illégitime était sulfureux. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Le faire avec une sensualité assumée et dans le décor glamour et chic d’une villa de St Trop’ (de Ramatuelle en fait) , alors au faîte de sa gloire, donnait au film un incontestable côté branché. Enfin, faire s’affronter Alain Delon et Maurice Ronet, deux jeunes premiers masculins, au style concurrent et déjà rivaux dans un autre film (Plein soleil de René Clément en 1960) avait du sens, surtout quand ils se toisent pour une Romy Schneider au top de sa beauté et une fausse ingénue nommée Jane Birkin. Mais comment trouver du sens à la même histoire aujourd’hui?
A bigger splash, a big shot
Un couple, une chanteuse rock qui doit prendre du repos et son amant du moment, prennent des vacances dans la villa chic isolée d’une île italienne. Elle est charismatique, habillée de tenues haut de gamme branchées – parfois, un peu masculines et trop déstructurées à mon goût – .
Il est hot, très hot, la virilité sereine dernière ses pectoraux d’acier. Elle, c’est Tilda Swinton, actrice puissante qui lie ici ses deux passions : les rôles (de moins en moins) borderline et ses performances en haute couture (avec le Musée Galliera notamment) qui visent à mettre en lumière de nouveaux créateurs. Lui, c’est Matthias Schoenaerts, l’incarnation du mâle actuel, taiseux, puissant, sexy en diable.
Déboule dans ce havre de paix perdu au milieu des vignes, sur l’île de Pantelleria, un ancien ami/impresario de la star, un bavard égocentrique accompagnée de sa fille, une jeune demoiselle aguichante qui n’a pas froid aux yeux. Entre eux quatre, se joue alors un drôle de jeu de séduction qui se conclura par un meurtre (dans la piscine, moins centrale ici que dans la version initiale).
Tout est dit ou montré
Dans le film de Deray, qui a tout de même un peu vieilli, les dialogues sont comptés et la sensualité débordante. Rien n’est vraiment montré sinon le bonheur évident que partage, au tout début du film, le couple torride que forment Romy Schneider et Alain Delon. A part cela, rien n’est montré, ou si peu ; tout est suggéré.
A bigger splash, le remake signé Luca Guadagnino, réalisateur italien d’Amore, un film délicat, peu démonstratif sur un adultère et déjà porté par Tilda Swinton, est lui très explicatif. Rien n’est ambigu, tout est lourdement démonstratif avec des dialogues ou des scènes largement explicatifs et par le jeu outrancier et insupportable de Ralph Fiennes, qui en fait des tonnes sans aucune nuance. Même Tilda Swinton est loin d’être à son meilleur, plus à l’aise d’habitude dans la subtilité, les marges de ses rôles que dans l’affirmation de son personnage de rock star un peu déchue.
Du coup, l’intérêt se déplace vers les rôles secondaires, Matthias Schoenaerts et Dakota Johnson, la jeune initiée de 50 nuances de Grey, qui ont eux au moins l’atout d’être fort plaisants à mater, euh pardon, à regarder.
De Luca Guadagnino, avec Tilda Swinton, Ralph Fiennes, Matthias Schoenaerts, Dakota Johnson…
2015 – Italie – 2h04