Cinquante nuances de Grey
Alors, que vaut 50 nuances de grey, ce blockbuster sorti pour la Saint-Valentin ?
Pas de quoi fouetter un(e) chat(te)…
Brûlot initiatique aux tendances SM soft ou film cul-cul pour faire frémir les jeunes filles ? 50 nuances de grey, ce blockbuster annoncé est en tous cas entièrement dévoué à un public féminin : l’affiche indique « curieuse ? » et ne laisse aucun doute à ce sujet).
Initiation
Autant le dire tout de suite, je m’attendais à tellement pire que je n’ai pas été déçue. Résumons le propos pour les ignares qui, comme moi, n’auraient pas lu, Cinquante nuances de Grey (beau titre), le bouquin de E.L James (énorme succès de libraire, vendu à plus de 100 millions d’exemplaires dans le monde).
Anastasia est une jeune étudiante en littérature anglaise qui, un peu par hasard, part interviewer le fameux monsieur Grey, un businessman qui règne sur Seattle. Grey n’est pas commode. Certes, il est plutôt pas mal de sa personne, mais c’est un control-freak, qui n’a ni ami, ni loisir revendiqué et que l’on n’a jamais vu au bras d’une femme.
Le prince charmant 2015
Anastasia tombe vite sous le charme de ce célibataire ultra-riche, avide de pouvoir, intrigant, amateur de surprises et de sensations fortes. Une sorte de prince charmant des temps modernes, suffisamment inaccessible pour qu’elle convoite.
Lui semble fasciné par cette oie blanche qui, contre toute attente lui résiste, tout en se livrant complètement. L’homme s’avoue déviant, sexuellement, là encore avide de pouvoir et de domination. Elle est vierge et amoureuse. Il va l’initier au sado-masochiste, en essayant d’imposer des règles qu’Anastasia a l’habilité de déjouer.
50 nuances de grey : tome 1
Inutile de raconter la fin puisqu’il y aura une suite et maintenant que le décor est planté, regardons attentivement ce succès annoncé, filmé comme il se doit dans un subtil dégradé de gris (elle seule porte de la couleur).
Sans surprise, ce film est une adaptation littérale de ce que fut le livre. Ici, pas de sous-texte, tout se passe à l’écran. Et les rares scènes explicatives (sur l’enfance difficile de Grey par exemple) sont rapidement évacuées sans aucune subtilité.
Si à 30 ans t’as pas d’hélico…
Mais, là n’est pas le propos. Ce film est –il intéressant ? Pour qui cherche à décrypter un fantasme féminin répandu, celui du prince charmant riche, responsable, amoureux, beau gosse, puissant etc… mais qui a évidemment son côté sombre (s’il n’y a pas d’âme à sauver, quel intérêt?), ce film est un décodeur pertinent.
Cela le rend-il sulfureux ? Pas vraiment, il joue habilement sur quelques scènes de sexe sado-maso qui montent en puissance mais dont la violence est surtout suggérée et malgré tout consentie. On ne voit aucune trace, aucun coup, aucune cicatrice… et la plupart du matériel de la fameuse chambre rouge reste bien sagement à sa place.
… c’est moins facile pour pécho
Sont seulement traitées les interrogations qu’une jeune fille amoureuse ne manquerait pas de se poser en tombant sur un initiateur de ce type. Et tant mieux, car ça la fait réagir.
Car, on comprend bien (trop ?) vite que ce fameux Christian Grey, tout puissant qu’il est, est en fait bien malheureux, incapable de contrôler sa perverse domination et qu’il est, de loin, le plus faible des deux.
Pas assez sexy
Du coup, ce film initiatique pour jeunes filles est plutôt un jeu de manipulation amoureuse, sans réelle perversité, beaucoup moins que dans Neuf semaines et demie d’Adrian Lyne par exemple. Sans excès de puritanisme américain non plus, même si le héros s’appelle Christian. On reste loin de la culpabilité catholique d’une Catherine Breillat dans Romance.
Gros bémol, toutefois : le casting. Si Dakota Johnson se tire très honorablement de ce rôle de girl next door sans jamais en faire une ingénue, Jamie Dorman est, lui, vraiment fade. Pas sexy du tout même si plutôt bien bâti, mais sans charme, sans envergure et surtout vraiment artificiellement pénétré quand il joue les ténébreux.
Lisse comme l’époque
Les autres personnages sont au mieux insignifiants, au pire pitoyables telle la roomate blonde tendance cochonne. Au moins dans Neuf semaines et demie Il y avait Mickey Rourke à l’époque où il était à tomber et la très sexy Kim Bassinger.
Qu’importe… 50 nuances de grey s’annonce déjà comme un carton, certes lisse, attendu. Comme l’est notre époque. Pas de quoi fouetter un(e) chat(te)…
De Sam Taylor-Johnson, avec Dakota Johnson, Jamie Dornan, Jennifer Ehle….
2015 – Etats-Unis – 2h05
La suite 50 nuances plus sombres est déjà programmée pour la Saint Valentin 2017.